Collection: Exposition en cours

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A propos / About

FÉLIX DESCHAMPS MAK

Duels

Du 9 mars au 21 avril

Deux ans après sa première exposition personnelle (Première partie, mars 2022), nous sommes très heureux d’accueillir à nouveau l’artiste Félix Deschamps Mak (France, 1995).

Après une année passée à Madrid en résidence à la Casa de Velázquez, l’artiste démontre plus que jamais que la singularité de sa peinture se loge dans sa capacité à composer des mises en scène magnétiques à partir d’éléments discordants, voire contradictoires. Puisant dans notre imaginaire collectif des références historiques, religieuses ou folkloriques, il les intègre à des souvenirs plus intimes, leur conférant une puissance symbolique saisissante. 

La narration intéresse peu Félix Deschamps Mak, qui lui préfère la puissance de l’instant, superbement servie par un jeu de contraste davantage poussé encore qu’auparavant : la palette réduite de l’artiste intègre des éléments pourpres ou des aplats jaunes surgissants de fond gris pâle, bleus, verts profonds…

Car dans ses oeuvres récentes, il est question de dualité. Les contraires s’affrontent dans une joute existentielle qui leur donne une raison d’être. Pas de Je sans opposition. Surgissement de la corrida, bien sur, mais aussi de la boxe ou plus simplement du combat avec ses propres démons. Les compositions de Félix Deschamps Mak se nourrissent également de son appétence caractéristique pour l’artifice : dépourvue de décor, cette lutte est mise en scène en vase clos; nous sommes les spectateurs-voyeurs des doubles jeux des figurants, avides de découvrir qui fera le jeu décisif…

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March 9 - April 21st

Two years after his first solo exhibition (First Part, March 2022), we are very happy to welcome back young artist Félix Deschamps Mak (France, 1995).

After spending a year in Madrid, in residence at Casa de Velázquez, the artist proves more than ever that the singularity of his painting lies in his ability to compose magnetic settings from discordant, even contradictory elements. Drawing historical, religious or folkloric references from our collective psyche, he mixes them with more intimate memories, giving them a striking symbolic power.

Storytelling does not really interests Félix Deschamps Mak, who prefers the power of the instant, superbly served by a play with contrast that he uses even more than before: the artist's reduced palette integrates purple elements or flat yellow areas emerging from pale gray, blue or deep green background…

Because in his recent works, it is a question of duality. Opposites clash in an existential contest that gives them a reason to exist. No « I » without opposition. The images convey bullfighting, of course, but also of boxing or more simply fights with one's own demons. The compositions of Félix Deschamps Mak also draw on his characteristic appetite for artifice: devoid of decor, this struggle is staged in isolation; we are the spectators of the double games of the actors, eager to discover who will make the decisive play...

Expositions / Exhibitions

Félix Deschamps Mak (b.1996) est un peintre français, diplômé des Beaux-Arts de Paris en 2021. Lauréat du Prix Marin en 2022, il présente sa première exposition personnelle « Première Partie » en mars 2022 à la Galerie Lazarew à Paris, avant de partir en résidence à la Casa de Velázquez de Madrid pour l’année 2022-2023. Il a également signé plusieurs scénographies, notamment pour Le Bourgeois Gentilhomme de Molière en 2019 et L’Avare de Molière en 2022, pièces jouées au Théâtre de la Ville de Paris.

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Félix Deschamps Mak (b.1996) is a French painter who graduated from Beaux-Arts de Paris in 2021. One of the winners of the Marin Prize in 2022, he presented his first solo exhibition “First Part” in March 2022 at Galerie Lazarew in Paris, before leaving for a one-year residency at Casa de Velázquez in Madrid (2022-2023). He has also signed several theater cenographies, notably for Le Bourgeois Gentilhomme by Molière in 2019 and L’Avare by Molière in 2022, that was performed at Théâtre de la Ville de Paris.

Texte / Text

Félix Deschamps Mak, Duels

par Enzo Menuge

« L’art est fait pour troubler. La science rassure » Georges Braque cité par Pierre Reverdy, Note éternelle du présent. Écrits sur l’art (1923-1960), Paris, Flammarion, 1960.

Un matador bras ouverts, comme un Christ ou un acteur tirant sa révérence. Un taureau tout droit sorti de Lascaux s’invite à une table de joueurs de poker criminels dans un rodéo absurde. Partout des saltimbanques, des comédiens, des acrobates costumés et fardés interprètent une pièce à la saveur douce-amère. Aucun tréteau ou estrade, mais la Galerie Lazarew tout entière comme une arène, une scène traversée ici par un chien errant harassé par le soleil madrilène ; là par un cortège à l’allure de déposition de croix. Sous le feu des projecteurs, une passe de muleta sans taureau. Ou est-ce plutôt une querelle de chiffonniers peu commodes ? Sur le ring, le duel des boxeurs touche à sa fin…Forfait par K.O ! Après le spectacle, un visage hagard est saisi par une main anonyme, dans un geste d’étreinte ou d’étau. Est-ce un acte de tendresse ou de domination, d’affrontement ou d’abandon ? Ce petit oxymore visuel résume à lui seul, l’ambiguïté de l’art de Félix Deschamps Mak situé entre attaque et défense, succès et échec, agressivité et accueil, victoire et défaite.

Une peinture sur le fil, le peintre acrobate prenant le risque de chuter à tout moment dans les gouffres du cliché tauromachique et de la référence malhabile aux maîtres. Evitant la chute, ses scènes convoquent évidemment Goya, Manet, Picasso, Barceló mais sont également nourries par son atlas personnel composé par des archives intimes et des images historiques (Figures, livre d’artiste, 947 pages, édité en 2023, 50 ex). Se servant des altérations subies dans l’atelier, il associe plusieurs photos, isole une figure ou un détail, soumettant les images à un processus de « digestion » qui peut les rendre méconnaissables, troublantes et clivantes.  Après cette étape, Félix Deschamps Mak débute immédiatement sur la toile immaculée, dans de petites esquisses fiévreuses puis dans des grands formats immersifs, sur lesquelles il trace au fusain les silhouettes dansantes de ses figures filiformes. Viennent ensuite les couleurs, toujours franches, ardentes comme celles des Beatus ibériques. D’un côté les bruns sales des carnations, de l’autre les cobalts profonds, les jaunes et rouge cadmiums éblouissants appliqués en larges aplats vibrants, qui se répondent d’une toile à l’autre.

Décorateur de théâtre, Félix Deschamps Mak se plait à remettre en scène ses compositions, à improviser de nouvelles saynètes, à rejouer une tragédie avec ses personnages extravagants et inquiétants, à la James Ensor. Au cours de l’exécution certaines de ces figures disparaissent sous la matière picturale, laissant parfois une béance remémorant la présence. Après le spectacle de la corrida, de la boxe et des comédiens résonne le silence de l’absence. Après le duel avec la toile reste la peinture… Enzo